Il neigeait à Valenciennes ce qui était assez fréquent pour les vacances de Noël et le moins que l'on puisse dire, c'était que la famille Juánes-Crúz n'en était pas toujours ravie. En effet, en ce qui concernait Saryne, elle n'aimait jamais autant sa ville que lorsqu'elle était recouverte de son manteau blanc. Cependant, ses parents ne semblaient plus avoir le goût de rien en ce moment. A une époque, ils emmenaient leur petite fille patiner dans le centre-ville mais c'était terminé. Saryne n'était plus la gamine naïve. Âgée de treize ans, elle était loin d'être aveugle et elle savait parfaitement que dans peu de temps, sa vie allait changer. Elle avait beau ne pas savoir exactement quand, elle s'y préparait quand même. Ainsi, la douleur se ferait moins puissante au moment venu. Saryne ? Où es-tu passée ? La jeune adolescente était installée dans un fauteuil près de la fenêtre, regardant les flocons se déposer un à un sur le sol déjà blanchâtre. Ses écouteurs dans les oreilles ne lui permettaient pas d'entendre son père qui l'appelait. Elle fut sortie de ses pensées lorsque quelqu'un lui enleva ses écouteurs d'un geste plutôt violent. Bordel, Saryne. Cela fait cinq minutes que Papa t'appelle. Tu attends quoi au juste ? C'est bon, je ne l'ai pas entendu, ce n'est pas la peine de t'exciter comme ça, Javier. Excuse-moi, petite sœur. Je ne suis tout simplement pas de très bonne humeur. Allez, vas-y, c'est important. Elle posa son baladeur (faute de mieux à l'époque) sur le rebord de la fenêtre. Elle déposa un léger baiser sur la joue de son frère afin de lui faire comprendre qu'elle ne lui en voulait pas de s'être emporté ainsi. Elle dévala les escaliers d'un pas rapide et rejoignit le salon où ses parents étaient installés. Ils lui firent signe de s'asseoir sur le divan face à eux. Leurs visages étaient graves et ils semblaient inquiets. Saryne de son premier prénom se demanda si le moment était alors venu. Saryne, nous avons décidé de divorcer. Saryne poussa alors un léger soupir. Le moment était donc vraiment arrivé. Elle porta le regard en direction de sa mère qui préféra baisser la tête. Pourquoi avait-elle honte ? Ce n'était pas atroce de ne plus aimer celui à qui l'on avait promis fidélité jusqu'à la mort. Aux yeux de l'adolescente, il était préférable qu'ils se séparent plutôt que de rester ensemble en fricotant chacun de leur côté. Saryne voulait surtout s'éviter de devoir tenir sa langue si, un jour, elle avait du croiser un amant ou une maîtresse de ses géniteurs. Hors de question de devoir affronter cela. Bien... Je peux retourner dans ma chambre ? C'est tout ce que tu trouves à dire. Et bien quoi... Tu as envie que je pleure ? Ne t'en fais pas, cela fait quelques mois que je me rends compte qu'il n'y a plus la passion dans vos yeux. A quoi cela servirait que vous restiez ensemble si l'amour n'est plus là ? Et oui, Papa, il faut te faire à l'idée, je ne suis plus une gamine. Il y eut quelques secondes de silence qui lui semblèrent durer une éternité. Tu peux y aller, ma chérie. Tiens, Saryne fut surprise que sa mère daigne répondre. Elle quitta la pièce et regagna sa chambre. Elle ne manqua pas d'entendre les débuts d'une dispute. Elle rejoignit son frère dans sa chambre, se laissa tomber sur le lit à ses côtés et fondit en larmes dans ses bras. Saryne avait toujours été bien plus proche de son grand frère, Javier que de sa grande sœur.

A l'âge de seize ans, Saryne quitte sa maison familiale bâtie à Valenciennes en compagnie de son grand-frère. Cela faisait à présent trois longues années que leurs parents se lançaient une guerre acharnée pour bénéficier de la garde de Saryne. Il n'avait pas à se battre pour celle de Giulietta ou Javier étant donnés qu'ils étaient déjà majeurs et qu'ils avaient quitté la demeure familiale pour leur plus grand plaisir. Javier avait toujours rêvé de découvrir d'autres cultures, d'autres contrées... Il avait toujours développer un grand amour de la découverte. De ce fait, il embarqua sa petite sœur sous le bras et ils partirent vivre en Écosse plus précisément à Dundee. Saryne ne tarda pas à devenir la plus heureuse des adolescentes. En effet, elle n'avait plus à supporter les querelles de ses parents à son égard et son frère était devenu le seul membre de sa famille à ses yeux. La famille Juánes-Crúz avait toujours été composé de deux enfants mais une avait préféré tracer sa route seule. Giulietta était toujours restée à l'écart de son frère et de sa sœur. C'était d'ailleurs pour cela que Saryne en a toujours voulu à sa grande sœur. Toutes les deux, elles ne se sont jamais comprises et ce n'était pas Javier qui comprenait davantage Giulietta. Entre eux, c'était une guerre similaire à celle qui régnait entre leurs parents. Saryne a pris le parti de son frère dès son plus jeune âge car il se préoccupait d'elle, LUI. S. reçut un réel coup de massue sur la tête lorsque son frère lui annonça qu'il s'était enrôlé dans l'armée anglaise. Tu prétends te soucier de moi après. Tu ne te foutrais pas un peu de moi par hasard, Javier Flavio Juánes-Crúz ? A quoi cela sert que tu m'aies emmenée avec toi si c'est pour m'abandonner trois ans plus tard... Vas-y, dis-le moi. Saryne, je tiens bien plus à toi que tu ne l'imagines. Tu es la seule famille qu'il me reste, ma chérie. Tu sais que je serais resté avec toi si j'avais pu mais j'ai besoin de faire quelque chose de bien dans ma vie. J'ai besoin que l'on me connaisse pour quelque chose que j'aurais fait. J'ai un besoin de reconnaissance que je ne peux assouvir que par mon entrée dans l'armée. Son seul moyen de le contacter avait finalement été les lettres qu'elle lui envoyait où la réponse ne lui parvenait que deux mois plus tard à cause de la distance mais également à cause de la difficulté à transmettre du courrier en plein conflit. Javier rentra quelques années plus tard, trois ans exactement. Saryne avait bien grandi du haut de ses dix-huit ans.

Toujours aussi appliquée en cours même si cela ne l'empêchait pas de s'amuser comme tous les jeunes de son âge, Saryne s'était alors lancée dans des études d'arts avec pour spécialité la photographie. Cela avait toujours été sa passion depuis sa plus tendre enfance et celle-ci ne l'avait jamais abandonnée. Elle prenait plaisir à photographier tout et n'importe quoi et plus particulièrement le partage ainsi que le bonheur qu'échanger les individus. Cependant, tout ne se passe pas toujours comme on l'aurait voulu. En effet, son frère ne mit pas bien longtemps à la quitter mais cela s'est produit contre leur volonté si l'on peut dire cela ainsi. Javier a été l'un des premiers contaminés par ce foutu virus qui fait rage à Dundee. L'anéantissement de Saryne ne fut que multiplié lorsque l'armée l'assassina sauvagement. Saryne était pourtant décidée à l'aider afin qu'il s'en sorte. Elle savait que son frère était devenu un assassin à cause de cette merde et qu'autrement, il n'aurait jamais été capable de tels actes. Ce qu'elle ne supportait pas, c'était que ceux qu'il avait servi remarquablement l'assassinent ainsi sous ses yeux. Puis, vint le moment où la ville fut partagée en deux. Elle fut alors éloignée de personnes qu'elle aimait car certains voulurent rester dans leurs maisons se trouvant du côté des infectés. Elle ne cesse de se faire du souci pour eux mais avec le temps, elle développait un certain instant de survie qui la pousse à penser davantage à elle qu'aux autres. Dieu merci, elle était du côté des non-infectés et de l'armée. Le mur bâti fut détruit par les infectés et Saryne se doit donc de rester prudente dans le moindre de ses déplacements. Certes, elle est courageuse mais elle ne peut masquer une certaine peur d'être contaminée sachant parfaitement que si cela lui arrive, elle devra mourir pour la survie des autres.